TRUMP RELANCE LA MACHINE À EXPULSER: 15 000 CAMEROUNAIS MENACÉS DE DÉPORTATION, LA RÉSISTANCE S’ORGANISE À WASHINGTON

By Franck Gutenberg
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Dans une décision qui ravive les tensions sur la politique migratoire américaine, l’administration Trump a annoncé son intention d’expulser plus de 15 000 Camerounais vers Yaoundé. Cette mesure radicale, initiée en pleine crise humanitaire dans les régions anglophones du Cameroun, a immédiatement déclenché une levée de boucliers de plusieurs sénateurs américains et d’organisations de défense des droits de l’homme.

Un contexte humanitaire explosif

Le Cameroun traverse depuis plusieurs années une grave crise sécuritaire. Les affrontements entre les forces gouvernementales et les séparatistes anglophones dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ont provoqué des milliers de morts et forcé des centaines de milliers de personnes à fuir leur foyer. À cela s’ajoutent des exactions documentées: arrestations arbitraires, tortures, exécutions extrajudiciaires, et un climat de peur généralisée.

Expulser des demandeurs d’asile vers un tel environnement représente, selon les experts, une violation flagrante du principe de non-refoulement inscrit dans les conventions internationales, qui interdit de renvoyer des individus vers des pays où ils risquent des persécutions.

L’administration Trump en croisade contre l’immigration

Dès son arrivée au pouvoir, Donald Trump avait fait de la lutte contre l’immigration illégale une priorité. Sous couvert de “sécuriser les frontières”, son administration a mis en place des politiques de tolérance zéro, supprimant des statuts temporaires et accélérant les procédures de déportation.

Dans le cas des Camerounais, beaucoup avaient trouvé refuge aux États-Unis en invoquant des craintes de persécution. Nombre d’entre eux avaient déposé des demandes d’asile, encore en attente d’examen. Pourtant, en dépit des preuves accablantes sur la situation au Cameroun, l’administration Trump a ordonné une série de déportations accélérées, baptisées “Vols de la mort” par certaines ONG.

Une opposition politique et morale

Face à cette offensive, des sénateurs américains, majoritairement démocrates mais aussi quelques républicains modérés, se sont fermement opposés à la décision. Ils dénoncent des expulsions précipitées, sans procédure régulière et sans évaluation sérieuse des risques encourus par les expulsés.

Dans une lettre ouverte adressée au Département de la Sécurité Intérieure (DHS), plusieurs élus ont exigé l’arrêt immédiat des déportations de Camerounais, rappelant que “forcer des êtres humains à retourner dans un contexte de guerre et de violations massives des droits de l’homme est contraire aux valeurs fondamentales américaines.”

Témoignages glaçants

Des témoignages de Camerounais récemment expulsés révèlent l’ampleur de la tragédie : certains auraient été arrêtés dès leur arrivée à Yaoundé, d’autres portés disparus. Beaucoup racontent avoir été brutalement traités durant les procédures de détention et d’expulsion aux États-Unis, privés d’interprètes, et contraints à signer des documents qu’ils ne comprenaient pas.

Les défenseurs des droits humains, dont Amnesty International et Human Rights Watch, parlent d’une “tache indélébile” sur la réputation des États-Unis et dénoncent une administration “plus préoccupée par des objectifs politiques que par des vies humaines.”

Un enjeu électoral sous-jacent

Cette politique migratoire dure, selon certains analystes, visait également à séduire une frange de l’électorat ultraconservateur, peu avant les élections présidentielles. Dans une Amérique profondément divisée sur la question de l’immigration, Trump a ainsi instrumentalisé la peur pour asseoir son image de “défenseur des frontières”, quitte à piétiner les principes fondamentaux de l’asile.

Quel avenir pour les Camerounais aux États-Unis?

Si le changement d’administration avec l’élection de Joe Biden a suscité de nouveaux espoirs, des milliers de Camerounais demeurent en situation précaire, leurs dossiers toujours en suspens. Beaucoup espèrent désormais bénéficier d’un Temporary Protected Status (TPS) spécifique pour le Cameroun, un statut qui leur permettrait de rester légalement aux États-Unis tant que la crise perdure.

L’histoire de ces 15 000 Camerounais renvoyés de force révèle une fois de plus comment les vies humaines deviennent des pions dans les jeux politiques des grandes puissances, et rappelle l’urgence de réformer en profondeur le système d’immigration américain.