INJUSTICE EN AFRIQUE: COMMENT L’EXPLOITATION ET LA NÉGLIGENCE ALIMENTENT LA CRISE SUR LE CONTINENT

By Franck Gutenberg
Image credit David S. Williams.

L’Afrique, un continent béni par des ressources naturelles abondantes, des cultures vibrantes et un potentiel immense, continue de sombrer dans des crises de faim, de pauvreté et de conflits. Pourtant, ces fléaux ne sont pas simplement le fruit d’une mauvaise gestion locale ou de catastrophes naturelles ; ils sont les symptômes de forces plus profondes et plus sinistres. Le sort de l’Afrique n’est pas accidentel, mais systémique, enraciné dans des siècles d’exploitation, de sabotage économique et de marginalisation délibérée sur la scène mondiale. C’est une histoire d’injustice où la richesse d’un continent est siphonnée tandis que son peuple est laissé à souffrir, privé de sa voix légitime dans la construction de son avenir.

 

Un continent privé d’opportunités

 

L’ampleur de la faim en Afrique est accablante. Des pays comme le Soudan du Sud, la Somalie, la région du Sahel et bien d’autres font face à des famines fréquentes, exacerbées par des sécheresses, des conflits et une instabilité économique. Mais l’idée que la faim en Afrique est une calamité naturelle ou uniquement due à une mauvaise gouvernance ne raconte qu’une partie de l’histoire. L’extraction délibérée des vastes ressources du continent, du pétrole aux diamants en passant par l’or et les minéraux rares, a joué un rôle clé dans l’appauvrissement de son peuple. Des entreprises étrangères et des gouvernements exploitent la richesse de l’Afrique, en utilisant des élites locales corrompues comme intermédiaires, laissant peu de place à l’économie locale pour prospérer.

 

C’est une vérité inconfortable : l’Afrique est riche, mais les Africains sont pauvres. Du cobalt et du cuivre de la République Démocratique du Congo aux champs pétrolifères du Nigéria, d’immenses réserves sont extraites par des puissances mondiales et des multinationales à une fraction de leur valeur. Ces ressources sont vitales pour l’économie mondiale, alimentant des industries en Occident comme en Orient, mais la main-d’œuvre africaine qui contribue à cette production reste appauvrie. Ce qui reste derrière, ce sont des dévastations environnementales, des conflits pour le contrôle des ressources et des gouvernements trop faibles ou complices pour défendre les intérêts de leur peuple.

 

La pauvreté qui en résulte n’est pas simplement une conséquence de l’exploitation, mais un outil de contrôle. La misère favorise la dépendance, et cette dépendance garantit que l’Afrique reste à la merci des institutions financières mondiales et des puissances étrangères qui dictent les conditions de l’aide, des prêts et des investissements. La famine n’est pas seulement une tragédie, c’est un mécanisme de pouvoir — une méthode par laquelle l’autonomie de l’Afrique est étouffée et son avenir dirigé par des forces extérieures à son contrôle.

 

Marginalisation mondiale : une voix réduite au silence aux Nations Unies

 

Peut-être que l’injustice la plus grande de toutes est l’exclusion constante de l’Afrique des prises de décision significatives sur la scène mondiale. Nulle part cela n’est plus évident qu’au Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU). Malgré plus d’un milliard d’habitants à travers 54 nations, l’Afrique n’a aucun siège permanent au CSNU la plus haute autorité mondiale en matière de paix et de sécurité internationales. Au lieu de cela, le sort des nations africaines est souvent décidé dans des salles de conseil à New York, Paris et Londres, où leurs intérêts passent au second plan face aux ambitions stratégiques des grandes puissances.

 

Cette marginalisation à l’ONU reflète une indifférence mondiale plus large envers les besoins et les préoccupations de l’Afrique. Les décisions concernant les missions de maintien de la paix, les sanctions internationales et la sécurité mondiale sont prises sans la participation africaine, même si l’Afrique en subit souvent les conséquences. Cette exclusion prive l’Afrique d’une voix pour résoudre les conflits sur son propre sol et laisse le continent dépendant d’interventions extérieures, souvent motivées plus par des intérêts économiques ou stratégiques que par une véritable préoccupation pour le bien-être des Africains.

 

L’arme des conflits et de la pauvreté

 

À travers l’Afrique, le conflit n’est pas seulement une conséquence de l’instabilité politique, mais un outil de domination économique. Dans des régions riches en ressources comme le delta du Niger au Nigéria ou les zones minières du Congo, des factions et des milices soutenues par des puissances étrangères se disputent le contrôle des ressources précieuses. Ces conflits ne sont pas de simples troubles internes; ce sont des guerres menées pour l’accès à des richesses qui, dans un monde juste, seraient utilisées pour sortir des millions de personnes de la pauvreté. Au lieu de cela, des gouvernements et des entreprises étrangères alimentent ces conflits en fournissant des armes et un soutien à ceux qui leur garantissent le plus grand accès aux ressources africaines.

 

De même, l’instabilité politique, souvent imputée uniquement aux échecs de la gouvernance locale, est dans de nombreux cas exacerbée par des ingérences extérieures. Les changements de régime, les coups d’État militaires et les assassinats politiques ont souvent été soutenus, voire orchestrés, par des puissances étrangères cherchant à installer des gouvernements plus favorables à leurs intérêts économiques. L’objectif est clair : maintenir des gouvernements faibles et malléables qui ne remettront pas en question le statu quo de l’exploitation.

 

La voie à suivre: une demande de justice et d’équité

 

Le peuple africain n’est pas une victime passive de ce système mondial d’exploitation. À travers le continent, des luttes anti-coloniales du 20e siècle aux mouvements de base d’aujourd’hui, les Africains se battent et continuent de se battre pour leur droit à l’autodétermination, à la justice et à la dignité. Cependant, ces efforts resteront entravés sans un changement radical de l’ordre mondial.

 

Premièrement, la communauté internationale doit reconnaître la place légitime de l’Afrique à la table des décisions. L’adhésion permanente du Conseil de Sécurité de l’ONU doit être réformée pour inclure une représentation africaine. Ce n’est qu’à ce moment-là que le continent pourra avoir un mot à dire significatif dans la formation des politiques qui affectent son avenir.

 

Deuxièmement, les relations économiques injustes qui entretiennent la pauvreté en Afrique doivent être démantelées. Les accords commerciaux doivent être renégociés pour garantir que les ressources de l’Afrique profitent à son peuple et non seulement aux multinationales étrangères. De plus, les flux financiers illicites qui drainent chaque année des milliards d’Afrique à travers la corruption, l’évasion fiscale et l’exploitation minière illégale doivent être arrêtés.

 

Enfin, les puissances et les entreprises étrangères qui continuent de tirer profit de la souffrance de l’Afrique doivent rendre des comptes. Les tribunaux internationaux et les institutions financières doivent tenir ces acteurs responsables de leur rôle dans la perpétuation de la pauvreté, des conflits et de la destruction environnementale sur le continent.

 

Un appel à la responsabilité mondiale

 

L’Afrique n’est pas intrinsèquement pauvre, ni destinée à rester en crise. Les vastes ressources du continent, sa population jeune et ses économies dynamiques offrent un potentiel de croissance et de prospérité. Mais tant que la communauté internationale ne s’attaquera pas aux injustices structurelles qui maintiennent l’Afrique enchaînée, ce potentiel restera inexploité.

 

Il est temps que le monde reconnaisse que les crises en Afrique ne sont pas de simples problèmes locaux, mais le résultat d’une longue histoire d’exploitation et de marginalisation. Pour briser ce cycle, nous devons construire un ordre mondial fondé sur l’équité, la justice et le respect de la souveraineté et de la dignité de l’Afrique. Ce n’est qu’à ce moment-là que l’Afrique pourra se relever, non pas comme un continent de désespoir, mais comme un foyer d’espoir et d’opportunités pour son peuple.